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Paul
passe à la télévision pour un interview. Ignorant qu’il est
à l’antenne, le présentateur qui le reçoit est en train
de renifler le bout de ses doigts. Il se reprend aussitôt
dès qu’il découvre que le rideau est levé. |
LE PRÉSENTATEUR
(au public) :
Amis souffreteux, bonsoir ! Nous accueillons ce soir l’homme qui
reçoit des noyaux d’olives en permanence. Un cas unique dans l'histoire
de la médecine moderne. Actuellement près d’un français sur 60
millions en souffre... (Montrant
Paul du doigt.) et c'est lui ! (A
son invité :) Monsieur Paul
bonsoir !
PAUL, recevant
quelques noyaux : Bonsoir !
LE PRÉSENTATEUR :
D'abord, dîtes-nous qui vous jette ces noyaux d'olives ?
PAUL, navré
: Mais personne, c'est là le drame.
LE PRÉSENTATEUR
: Vous n'êtes pas portugais pourtant ?
PAUL, hésitant
: Euh… pas à ma connaissance.
LE PRÉSENTATEUR
: Alors comment expliquez-vous cet étrange
phénomène ? S'agit-il d'une manifestation paranormale ? D'un esprit
malin qui vous en voudrait personnellement ? Ça s'est déjà vu…
PAUL :
Non, pas du tout ! Il s'agit au contraire d'une maladie extrêmement
rare, encore inconnue de la médecine moderne qui, comme vous l’avez
souligné, touche un français sur 60 millions... (Profondément
navré.) et c'est moi.
Alors que Paul reçoit
une pleine poignée de noyaux, le présentateur, n’ayant pas écouté
la réponse, est en train de se renifler les aisselles.
LE PRÉSENTATEUR,
revenant à Paul :
Les gens vous prennent pour Majax ?
PAUL, surpris
: Je vous demande pardon ?
LE PRÉSENTATEUR
: Euh... S'agit-il de noyaux d'olives noires
ou d'olives vertes ?
PAUL, catégorique
: Non !
LE PRÉSENTATEUR
: Et ce n'est pas contagieux au moins ?
PAUL, recevant
les noyaux par poignées : Pas
que je sache. Pas plus que le bégaiement, l’hirsutisme ou la clavicule
cassée. De même que certains ne fixent pas le calcium, moi je
reçois des noyaux d'olives en permanence.
Cette fois, le présentateur
est en train de renifler l’intérieur de sa chaussure qu’il lâche
nonchalamment pour poser la question suivante.
LE PRÉSENTATEUR :
Vous ne fixez pas non plus les noyaux d'olives…
PAUL :
Pas encore. Heureusement.
LE PRÉSENTATEUR,
relaçant son soulier :
Et Christian Quidet vous fait-il penser à un réfrégirateur
?
Paul lui lance un mauvais
regard.
LE PRÉSENTATEUR
: Finalement dans votre malheur, vous avez
encore de la chance, quand on pense que ça aurait pu être des
pierres, des pneus ou même des éviers... n'est-ce pas monsieur
Paul ?
PAUL :
Absolument ! Puis réalisant soudain
: Des éviers !?…
LE PRÉSENTATEUR
: Mais dans ce cas, vous ne seriez pas là
pour nous en parler…
PAUL :
En effet, je ne pense pas…
Sa réponse à peine formulée,
Paul s’effondre sous le choc d'un énorme noyau d'olive de la
taille d’un ballon de rugby. Occupé à se renifler le bas du
ventre, le présentateur ne remarque rien.
LE PRÉSENTATEUR,
se redressant : Comme
quoi, comme on dit : « À chaque chose malheur est bon ». N'est-ce
pas monsieur Paul ?
Paul, affalé sur
le sol, ne répond plus.
LE PRÉSENTATEUR,
cherchant son invité : Monsieur
Paul ?… Vous n’êtes pas obligé de répondre… Monsieur Paul ?…
(Se tournant vers le public.)
Une drôle d’affaire en somme… Et maintenant
la suite de nos programmes.
Avant le tomber de rideau,
croyant ne plus être à l’antenne, le présentateur se renifle
à nouveau le bas du ventre, à hauteur de la braguette.
©
Charlzes T. Diggles 1997